AIGNERVILLE. Eglise saint Pierre


Rédaction originale de l'Association Passé Patrimoine Aignerville (APPA)

          La fondation en est romane (quelques parties remontent au XIIème siècle) avec certains éléments de style gothique et d’autres de fin XVIIème (dernier étage). L’église d’Aignerville a été restaurée en 1763. C’est sans doute à cette époque qu’ont été installées les fenêtres du choeur pour l’éclairer davantage. La date 1763 est indiquée au-dessus des fenêtres à l’extérieur. L’église dépendait du chapitre de la cathédrale de Bayeux qui percevait 2/3 de la dîme et nommait à la cure.

           Après la révolution et le Concordat la paroisse a navigué entre autonomie et rattachement à Formigny ou Ecrammeville. En effet, en raison de l’éloignement, le Maire a souvent réclamé l’autonomie. Ceci fut accordé en 1825 quand Aignerville fut érigée en église vicariale et en 1879 en tant que succursale.

 

 

 

 

VISITE DE L’’INTERIEUR DE L’’EGLISE

         Vous entrez par une porte qui a été posée en 1869 par M. Hamel de Trévières. Les comptes du registre de la Fabrique nous apprennent qu’il dut en fabriquer une deuxième car la première ne correspondait pas au devis proposé.

La nef, dont le plafond est lambrissé, communique avec le choeur par un arc ogival triomphal. Ce lambris, en arc déprimé, datant de 1870, a remplacé un précédent lambris horizontal qui produisait un effet déplaisant dans l'église.

Sur le mur de gauche une armoire abrite la bannière de procession ornée d’une très jolie broderie et représentant Saint Pierre à qui est dédiée cette église. Il tient les clés de la main gauche et un livre de la droite.

Toujours à gauche, admirez les magnifiques fonts baptismaux en porphyre avec cuvette en étain. Les charnières ont disparu.

A droite se trouve le confessionnal muni de sa loge centrale fermée par une porte pour le prêtre et les deux loges où venaient s’agenouiller les pénitents. Que de secrets y furent confiés
au prêtre !

Les bancs sont fixés sur une estrade. Ils ont été construits en 1853 par Constant Letourneur,
menuisier à Formigny pour la somme de 675 francs

L’adjudication d’un banc appartenait à la Fabrique et obéissait à des règles très précises définies par le décret du 30 décembre 1809. Les bancs étaient adjugés au plus offrant et dernier enchérisseur.

Cette concession de bancs constituait une des ressources majeure de la Fabrique. A titre d’exemple, l’adjudication de 1858 rapportait à la Fabrique 307 francs. La mise à prix était de 12 francs.

La rangée située près du confessionnal était réservée aux pauvres qui, sans doute, ne pouvaient pas enchérir. C’était le cas au temps du curé HAVARD au début du XIXème siècle qui veillait à ce que cette règle soit bien respectée.

A l’autre bout de la nef se trouvent six très belles stalles dont deux plus larges. Pour qui ? Pour les membres de la Fabrique ? Est-ce le banc de l’oeuvre, appelé ainsi car le mot fabrique gardait ce sens d’oeuvre.

 

Dans le choeur de simples stalles étaient réservées aux notables avec la patère pour accrocher leur chapeau. Elles ont été posées en 1869.

Deux petits bancs accueillaient les enfants de choeur. A droite, au début du choeur, se trouve le banc du châtelain, fermé et situé près de la porte de la tour-clocher par laquelle il accédait à l’église. Un magnifique bénitier les accueillait, lui et sa famille, à l’entrée.

On distingue un alignement de dalles tombales dont les inscriptions sont presque illisibles. Par contre à l’entrée du choeur se trouve la pierre tombale de Michel PASTUREL. On peut y lire très clairement l’inscription suivante :

Ci gist le corps de discrète personne

Mr Michel Paturel, pbre curé de ce lieu
Décédé le 1x de xbre MCCXLVIII
Agé de LXII ans



Michel PATUREL nous est devenu très familier car son nom apparaît souvent dans les registres paroissiaux de cette époque.

Un chemin de Croix évoque la Passion du Christ. Il a remplacé il y a quelques années un chemin de Croix du XIXème siècle malheureusement incomplet. Assez curieusement les quatorze stations, des lithographies en couleur, sont légendées en français et en espagnol. Nous n'en avons pas découvert l'origine.

Plusieurs statues ornent la nef.
A droite nous voyons Sainte Thérèse de Lisieux. Sa bénédiction, en 1930, est attestée par l’Indicateur de Bayeux:
« Le dimanche 28 septembre aura lieu la bénédiction d’une statue de Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus. Grand messe à 10 heures. A 3 heures vêpres présidées par M. le chanoine Guérin curé-doyen de Trévières. Allocution par M. l’abbé LE BOHEC, curé de Longueville etc.. »
Sous la statue se trouve la plaque paroissiale, de marbre blanc, qui rappelle les poilus morts pendant la Grande Guerre. Nous les retrouvons sur notre monument aux morts. Rien ne permet de dater la commande ni d’en connaître le commanditaire.

 

A gauche vous reconnaissez la statue de Sainte Barbe offerte par l’Abbé Benoit, curé de la paroisse, le 1er décembre 1907. La sainte est représentée avec la tour aux 3 ouvertures. Elle y fut enfermée par son père pour la protéger du prosélytisme chrétien. Cela n’empêcha pas la sainte d’être baptisée par un prêtre chrétien déguisé en médecin. Sainte Barbe perça une 3ème fenêtre pour évoquer la Saine Trinité.

Sur les deux autels secondaires se trouvent la statue de Saint Pierre, toujours avec ses clés et en face une vierge à l’enfant. Cette dernière a été offerte par Mme ALBERT en 1851, à l’occasion du mariage de sa fille Armandine (Mme ALBERT était née Euphrosine DUNY, fille de M. DUNY, châtelain d’Aignerville qui fit don de la chapelle Saint Louis de Formigny au roi Louis Philippe). Mme ALBERT donnera aussi le tableau, peint par elle-même, représentant une vierge à l’enfant qui se trouve dans le choeur.


En 1931 la paroisse s’est associée aux hommages rendus à Jeanne d’Arc à l’occasion de la commémoration de sa mort le 30 mai 1431. Des familles d’Aignerville passèrent commande des vitraux à l'atelier THOMAS-DUCOUR de Bayeux. Vous reconnaissez la Sainte, St Louis, Notre Dame de Lourdes et St Michel. Un journal paroissial de 1931 annonce leur bénédiction fixée au 25 mai et notifie la justification de ce choix comme suit. « Cette année, la paroisse d’Aignerville, sur laquelle commencèrent les combats du 15 avril 1450, orne la nef de son église de beaux vitraux représentant Notre Dame de Lourdes, St Michel, St Louis et Ste Jeanne d’Arc. Leur bénédiction permet de rappeler les célestes interventions en faveur de notre pays …. Aucune nation n’a été sauvée par une femme, plaçant sur son étendard le nom de la Vierge qu’on honore à Lourdes, par une femme envoyée de l’Archange St Michel, chef
de la milice du ciel, à la demande de St Louis protecteur spécial de notre pays. »

Le choeur, datant sans doute du XIIIème siècle, appartient au style ogival.

Un retable – lambris occupe le fond du choeur. De style rocaille il date de 1761. Composé de trois parties il est plaqué contre le mur. La polychromie de l’ensemble a été restituée en 1967. Au centre se trouve une Assomption, offerte à l'église d'Aignerville en 1874 par l'Association pour la Sauvegarde des Edifices Religieux de Basse-Normandie.


Le devant du maître-autel - le terme technique est antependium - est formé de cubes avec en leur centre une tige reliée à une barre que l’on activait sur le coté. Cette particularité permettait aux fidèles qui ne savaient ni lire ni écrire de se repérer dans l’année liturgique. L’Association Passé Patrimoine Aignerville en a fait restaurer la menuiserie et le mécanisme en septembre 2009.

(Voir l'article paru dans "La Renaissance du Bessin à ce sujet")    (détails)

Plusieurs tableaux, malheureusement en très mauvais état, ornent le choeur : un jugement de Salomon peint sur un panneau de bois date du début du XVIIème siècle. Il a été classé par les Monuments historiques en 1983. Vous remarquez également les représentations d’un Christ en gloire, d’une crucifixion et d’une vierge à l’enfant.

L’harmonium a été acheté à la suite d’une demande faite au conseil de la Fabrique par le curé en 1863. Il souhaitait, en effet «donner aux jeunes le goût de la musique religieuse,…..amener de la part des fidèles une fréquentation plus assidue de l’église et ajouter beaucoup à la solennité de l’office.»
L’intérieur a été restauré en 1967/1968 à l’initiative du Père TRENTSAUX, curé de Formigny, et de Jacques POUGHEOL, directeur du patrimoine pour le Département ; en particulier le plafond, le retable, la base du maître-autel et un tableau du XVIIIème siècle.

FAISONS LE TOUR DE L’’EXTERIEUR

La tour – clocher, quadrangulaire, nous permet de repérer très nettement les différentes époques de la construction de l’église : une base romane et une partie moyenne gothique qui daterait du XIVème siècle comme l’indiquent les ouvertures ogivées à meneaux sur chaque face. La partie supérieure, sans doute du XVI éme siècle, se termine par un toit en pierre à quatre pans.

La tour abrite une cloche qui a été baptisée le 9 juin 1930. Elle porte cette inscription « j’ai été baptisée le 9 juin 1930, M. A. CAIRON, curé de Formigny étant desservant d’Aignerville et M. Alexandre CROSVILLE, maire. J’ai été nommée Jeanne – Antoinette, par Pierre LEPETIT, conseiller municipal et dame Victor LE NEVEU, née Armande LE BARBEY»

Comme pour beaucoup d’églises de notre région cette tour -clocher joua un rôle défensif important pendant la guerre de Cent Ans. En 1371, après une visite des forteresses les autorités demandèrent au sire de « Comlombières » de mettre l’église en état de défense (Mémoires de la Société des antiquaires de Normandie XIème volume, années 1837, 38 et 39) Arcisse de Caumont note que cette tour communiquait à l’origine par une arcade à plein cintre
avec une chapelle parallèle au choeur actuel. Il reste d’ailleurs deux départs d’arc.

Ainsi décrite l’église d’Aignerville présente toutes les caractéristiques d’une église modeste, typique d’un petit village du Bessin.

 

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