EXTRAIT d'une "
NOTICE SUR LES CURÉS DE VIERVILLE-SUR-MER "
rédigée par Pierre Alexandre Le PAULMIER )
Desservant
(1752-1805-1824)
(Autobiographie écrite à la 3ème personne, datée
du 1er avril 1813, témoignage intéressant sur la vie en
Europe à l'époque des troubles de la Révolution
et des guerres napoléoniennes)
La succursale de Vierville ayant donc vaqué
vers le mois d'octobre 1804 M. l'évêque y nomma le dit
sieur Pierre Alexandre Le PAULMIER et lui en donna l'institution canonique
le 2 de janvier 1805
et il n'y fut installé que le deux
février suivant.
Il était de Bayeux, né dans la paroisse de Saint Sauveur
le 20 février 1752 ; il avait été curé de
la paroisse de SaintLaurent de la dite ville en l'année 1784.
Il permuta cette cure avec celle de Saint Martin de Bayeux en 1785 et
y resta jusqu'en 1790.
M. De Cheylus, évêque de Bayeux, l'ayant nommé en
janvier 1789 curé du Mesnil-au-Grain, doyenné d'Evrecy,
il accepta ce bénéfice et y alla résider au mois
de juillet 1790; il ne la desservit que deux ans jusqu'au mois de septembre
1792, époque où il fut obligé de prendre la fuite.
En effet n'ayant pas prêté le serment exigé par
l'Assemblée Constituante et la déportation ayant été
décrétée contre les prêtres insermentés
le 26 août 1792, le dit sieur Le PAULMIER, muni d'un passeport
pris à la municipalité de Bayeux, s'embarqua à
Courseulles le 4 septembre du dit an et passa à l'île de
Guernesey où il séjourna pendant dix mois.
De là il passa en Angleterre où il ne demeura, tant à
Winchester qu'à Londres que trois mois. Au mois de juillet 1793,
il passa dans les Pays-Bas autrichiens, y resta un an, tant à
Gand qu'à Harzedouhc (?), village à deux lieues d'Anvers;
poursuivi par les Républicains qui avaient envahi ce beau pays,
il fut forcé de l'abandonner au mois de juin 1794.
Il se retira en Hollande et resta dans un village nommé Rech
à trois quarts de lieue de la ville de Grave, sur la Meuse, dans
le Ravestein. Il ne put y rester que pendant six semaines, l'armée
française faisant continuellement des progrès.
Il prit le parti de se retirer dans un pays neutre.
Au commencement de septembre 1794, il prit la diligence à Nimègue
et le 20 du dit mois, il était arrivé à "Augsbourg"
ville libre et impériale en Souabe.
Là, on lui persuada que les " agents " de l'Empereur
ne le laisseraient point passer dans le Tirol à moins qu'il n'eut
un passeport d'un ministre de l'Empereur. N'en ayant point, il se détermina
à passer l'hiver à Augsbourg, mais les sénateurs
de cette ville, pour se ménager la faveur de la République
Française, crurent devoir chasser de leur ville 30 à 40
prêtres français qui s'y trouvaient.
Mais le prince évêque les recueillit et les fit transporter
à Dillingen où il était seul maître et où
ils furent logés dans l'ancien pensionnat des Jésuites,
et nourris aux dépens d'une souscription faite en leur faveur
par le clergé catholique et les plus notables citoyens d'Augsbourg.
Le dit sieur Le Paulmier ne resta dans cet "asile" que jusqu'au
19 mars 1795. Muni de tous les passeports qu'il put se procurer, il
en partit le dit jour, accompagné d'un religieux de la Trappe,
il s'achemina vers le Tyrol, où il n'éprouva aucune difficulté,
et traversant ce pays montueux par Innsbruck, Brixen, Trente, Rovereto,
il arriva heureusement à Vérone le 10 avril 1795.
Il s'y fixa et y resta jusqu'au mois de septembre qu'il passa à
Venise; dix jours après il s'embarqua sur l'Adriatique et
débarqua à Ancône, de là à Lorette
et de Lorette à Rome où il fit son entrée triomphante
le 17 octobre du dit an 1795.
Dans Rome et les environs, il séjourna pendant trois ans, ou
environ. En 1797 il voulait repasser en France, mais l'affaire du 18
fructidor ayant mal tourné, il fallut rester.
Un envoyé du Pape vers le Directoire, à qui il avait donné
quelques leçons de langue française, le fit placer chez
les Augustins de Toccanella à 17 lieues de Rome et douze de Viterbe,
où il resta jusqu'au mois de septembre 1801.
A cette époque les affaires de France paraissant se raccommoder
et une convention entre le Souverain Pontife et le premier Consul ayant
été souscrite le 15 juillet de 18019 il prit le parti
de revenir en France.
Il se rendit d'abord à Florence où il séjourna
près de deux mois pendant lesquels il fit quelques excursions
à Pise, à
Livourne, à Luques, à Pistoye. Enfin vers le mois de novembre
il se rendit à Lérici, s'embarqua sur le golfe de la Spézia
et vint débarquer à Gênes le 10 de novembre 1801.
Il n'y resta que sept jours et s'étant rembarqué sur une
felouque pour Nice il y aborda heureusement le 19 du dit mois, où
ayant pris une voiture pour Marseille il y arriva le 30.
Ayant traversé toute la Provence par un chemin complètement
ruiné, il resta un mois à Marseille, en passa trois autres
à "Boucq", à trois lieues de la dite ville sur
la route d'Aix, chez des demoiselles qui avaient " une chapelle
domestique ".
La belle saison étant arrivée, il quitta ce charmant endroit
et passant par Avignon, Lyon, il arriva à Paris vers les premiers
jours de mai 1802. Après avoir vu et visité cette grande
et belle ville, il se rendit à Rouen et de là à
Caen où il arriva le 15 ou le 16 de mai.
De là à Tierceville, canton de "Rie", près
de "Creully", chez son frère.
Le Concordat ayant été publié et mis à exécution,
il fut nommé desservant provisoire de l'église de Tierceville.
Ayant été ensuite érigée en succursale,
il en fut nommé desservant et n'y resta que neuf mois.
Mécontent de cette place, il accepta volontiers celle de Vierville
qui se trouva vacante en janvier 1805, où il est encore actuellement.
Telle est l'histoire de ce desservant écrite par lui-même.
Si, pendant son vivant il arrive quelque chose qui mérite d'être
transmis à la postérité il en fera note sur le
présent
Ce premier avril 1813
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